13/12/2022 - 4 min de lecture
En France, les trois-quarts des déchets proviennent de l’activité du bâtiment et des travaux publics. Encadrées par des dispositions réglementaires évolutives, la gestion et la valorisation des déchets de chantier représentent un enjeu environnemental et économique majeur.Réemploie et recyclage des déchets de chantier
En France, les trois-quarts des déchets proviennent de l’activité du bâtiment et des travaux publics. Encadrées par des dispositions réglementaires évolutives, la gestion et la valorisation des déchets de chantier représentent un enjeu environnemental et économique majeur.
Avec 46 millions de tonnes, le secteur du bâtiment est le premier producteur de déchets en France, devant les déchets ménagers (31 millions de tonnes). Les déchets de chantier proviennent à 51 % de la démolition, 36 % de la rénovation et 13 % de la construction neuve.
L’essentiel de ces déchets est constitué d’éléments minéraux et inertes. Ce sont des briques, du béton, des tuiles, du verre, de la terre ou encore des pierres. Si le pouvoir polluant de ces derniers reste mesuré (moins de 5%), ils constituent toutefois un important gisement de matières premières sous-exploité.
Règlementation : renforcement de l’obligation de valorisation des déchets
Dans le contexte global de lutte contre le changement climatique et de raréfaction des ressources, les législations européennes et nationales se renforcent pour inciter à réduire et valoriser les déchets de chantier.
En 2015, la Loi relative à la Transition Énergétique pour la Croissance Verte (LTECV) et la
Stratégie Nationale Bas Carbone donnent des objectifs de valorisation matière de 70% des déchets du bâtiment. Cela implique une transformation utile des matériaux afin de réduire la quantité de déchets admis en déchetterie.
Le code de l’environnement, art L541-1, précise également la hiérarchie de traitement des déchets :
- Tout d’abord avec la prévention des déchets
- Le réemploi de matériaux
- La valorisation matière ou le recyclage des déchets
- La valorisation énergétique des déchets
- L’élimination finale
Cette réglementation définit également la responsabilité du Maître d’Ouvrage (MOA) quant au traitement des déchets de chantiers de déconstruction. Considéré comme propriétaire des déchets, il est alors tenu d’assurer la bonne valorisation ou élimination finale de ces matériaux même lorsqu’ils sont transférés à des tiers. Ce procédé implique la sélection de prestataires habilités et la supervision du traitement des déchets
- Le Diagnostic Produits Equipements Matériaux Déchets (PEMD), instauré par la loi de 2011, il est obligatoire et préalable à toute déconstruction de plus de 1 000 m². Il complète le diagnostic Déchet en indiquant le potentiel de valorisation de chacun des matériaux selon la hiérarchie de traitement des déchets.
- La Responsabilité Elargie des Producteurs de matériaux (REP), sur le principe du « pollueur-payeur » : les producteurs de matériaux financent des éco-organismes qui récupèrent les produits usagés et les recyclent.
De plus, pour une meilleure information des consommateurs, la loi AGEC stipule que les mentions relatives à la gestion et aux modalités d’enlèvement des déchets doivent obligatoirement figurer dans les devis.
Prévention : limiter la production de déchets
Les évolutions réglementaires témoignent de la volonté de limiter l’impact des déchets de chantier sur l’environnement. Une prise en compte qui ne doit pas se limiter au traitement en aval.
En effet, prévenir au maximum la production de déchets participe à limiter
le poids carbone des bâtiments , c’est aussi une source d’économie : tout déchet non produit n’aura pas à être traité.
Le recours aux matériaux de réemploi ou
éco-sourcés permet d’inscrire plus globalement le projet de construction ou de réhabilitation dans un cercle vertueux d’utilisation des ressources naturelles. Par exemple, l’utilisation de
bois de classe A (non traité) ou B ou AB (traité et non dangereux) permet une meilleure valorisation lors d’une déconstruction.
Une prévention également soutenue par de nouvelles façons de concevoir les bâtiments en anticipant leur démontabilité et par une conception « réversible ». Ainsi, les matériaux peuvent aisément être réutilisés et les bâtiments quant à eux, peuvent évoluer dans le temps selon les usages voulus : bureaux, logements, accueil de publics.
Déconstruction soignée : nouvelles pratiques de chantier
La dépose sélective des éléments lors d’une déconstruction contribue également à la réduction et valorisation des déchets en orientant certains produits vers des filières de recyclage ou de réemploi.
Certaines filières de recyclage restent toutefois encore balbutiantes, les matériaux peuvent être traités mais leur collecte n’est pas optimisée
La REP (Responsabilité Elargie des Producteurs) mise en place au 1er janvier 2022 pour mise en application au 1er janvier 2023, impose également la supervision du traitement des déchets par le Maître d’Ouvrage. Elle fait appel à des éco-organismes missionnés pour récupérer les déchets de chantier et les retraiter conformément aux dispositions obligatoires. L’objectif étant le développement des filières de collectes et de valorisation des matériaux.
Un tri efficace des déchets sur site est également la clé d’une orientation efficace de certains éléments vers les filières de réemploi (in situ sur le chantier ou ex situ sur d’autres chantiers, mise en vente sur une ou plusieurs plateformes en ligne dédiées). De plus, ces matériaux de réemploi ne sont pas comptabilisés comme déchets en tant que tels.
Quels impacts sur le secteur du bâtiment ?
Entre réemploi de matériaux et gestion plus complexe des déchets, les différentes obligations impactent les chantiers mais aussi les façons de concevoir, planifier et organiser les déconstructions.
Un changement important qui pousse la filière du bâtiment aux initiatives afin de structurer sa transformation. C’est ainsi qu’émergent de premiers groupes de travail, tel que le programme DEMOCLES mis en place par l’ADEME auquel a participé Crédit Agricole Immobilier, pour une gestion vertueuse des déchets de déconstruction.
De la même manière que le tri de nos déchets ménagers s’est imposé à nous, le secteur du bâtiment se développe pour faire de ces initiatives des obligations à l’impact vertueux.
Ces démarches s’inscrivent dans une économie circulaire permettant de revaloriser les déchets en ressources et ainsi de conserver et réemployer une matière qui se raréfie. L’opportunité également de créer de nouveaux emploi dans un contexte économique tendu.