13/12/2022 - 4 min de lecture
Parmi les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre, le bâtiment se réinvente pour limiter le poids carbone des constructions. L’évolution de la réglementation permet au secteur d’adopter des méthodes de mesure de l’impact carbone.Comment évaluer le bilan carbone d’un bâtiment ?
Parmi les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre, le bâtiment se réinvente pour limiter le poids carbone des constructions. L’évolution de la réglementation permet au secteur d’adopter des méthodes de mesure de l’impact carbone.
Après l’expérimentation du
label E+C- (Énergie Positive et Réduction Carbone), la méthode d’analyse du cycle de vie dynamique (ACV) s’impose dès janvier 2022 pour calculer l’impact carbone (CO2) des constructions neuves. Intégrée à la nouvelle
réglementation environnementale 2020 (RE2020), l’ACV vise à estimer le poids carbone des opérations de construction neuve afin de favoriser les bâtiments peu consommateurs d’énergie et de matériaux ou ayant recours à des énergies et matériaux moins carbonés.
Un bilan carbone mesuré pendant toute la durée de vie du bâtiment
L’empreinte carbone d'un bâtiment représente la somme de tous les gaz à effet de serre (GES) émis pendant les phases de son cycle de vie.
Ce bilan comprend :
- les émissions de GES liées à la production des matériaux et des équipements utilisés pour la construction (béton, isolants, revêtements, équipements techniques …)
- toutes les émissions générées par l’ensemble des consommations d’énergie durant l’exploitation du site.
Ce bilan énergétique peut être impacté par la variabilité des conditions climatiques : en hiver avec l’utilisation du chauffage et en été avec le recours fréquent à la climatisation, et contribue à l’augmentation des émissions de CO2. C’est alors tout l’intérêt d’œuvrer à une conception bioclimatique des bâtiments afin d’optimiser la consommation d’énergie en toutes saisons, de favoriser les apports solaires en hiver, tout en les limitant au maximum l’été.
Sur une durée de vie de 50 ans d’un bâtiment, aux performances énergétiques responsables, on estime que 60 à 90% de son impact carbone est issu de sa construction et déconstruction.
Au regard de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), le carbone est mesuré en kg eqCO2/m², le secteur de la construction vise une diminution des émissions d’au moins 30% à l’horizon 2030.
Quels critères entrent en ligne de compte pour la mesure du poids carbone d’un bâtiment ?
Dans le secteur de la construction, et pour faciliter l’appréhension et la mise en œuvre de cette mesure, les pouvoirs publics ont décidé d’appliquer la méthode ACV dite dynamique pour mesurer le poids carbone d’un bâtiment.
Cette ACV dynamique prend en compte le fait qu’une émission générée plus tôt, impactera mécaniquement le climat sur une durée plus longue qu’une émission générée plus tardivement. Elle tend ainsi à valoriser les matériaux permettant le stockage temporaire du carbone : les matériaux bio et géo-sourcés qui, lors de leur croissance, vont absorber une partie du CO2 environnant.
La FDES, la carte d’identité environnementale d’un produit de construction
La fiche de données environnementales et sanitaires (FDES) est un document normalisé qui présente :
• les résultats de l’ACV d’un produit
• des informations sanitaires utilisés dans le calcul de la performance environnementale et sanitaire d’un bâtiment, composé de 15 indicateurs environnementaux
La FDES prend en compte l’ensemble du cycle de vie du produit, de l’extraction des matières premières à sa fin de vie, sans oublier les transports, la mise en œuvre et l’usage même du produit en question.
Elles constituent un outil multicritère majeur permettant d’aider les professionnels dans leur choix pour rendre un bâtiment plus durable, avec des impacts limités sur l’environnement.
Trois types de FDES sont utilisés :
- les FDES collectives, pour un produit type fabriqué par plusieurs industriels ;
- les FDES individuelles, pour un produit fabriqué par un seul industriel, et correspondant à une référence commerciale ;
- les FDES établies par des configurateurs et adaptées au produit utilisé sur la construction évaluée.
Mesurer pour agir : quelles solutions pour réduire l’empreinte carbone ?
Déterminer le poids carbone d’un bâtiment vise, en toute logique, à définir sa trajectoire de réduction de son impact environnemental. Cela passe notamment par un usage plus fréquent du
bois et des
matériaux biosourcés , particulièrement avantageux grâce à leur capacité de stockage du carbone, ou encore le recours aux matériaux de réemploi dont l’empreinte carbone a déjà été amortie. Pour ces derniers, le poids carbone est d’ailleurs comptabilisé à zéro dans le calcul ACV au format RE2020 puisqu’ils limitent également la quantité de déchets générée.
La démarche de la mesure du poids carbone des bâtiments illustre une évolution majeure de la façon de construire. C’est toute
une filière qui se mobilise pendant les années à venir pour contribuer fortement à la lutte contre le changement climatique.
L'avis de l'expert
« Déterminer le poids carbone d’un bâtiment intervient dès le stade de la conception. Il faut avoir une vision globale des quantités de matériaux et de produits que l’on va employer. Avec les FDES, c’est principalement un calcul à faire. On peut ainsi jouer sur différents paramètres (puits et stockage de carbone, réemploi, etc.) et viser la diminution la plus forte possible. Ensuite, c’est la vie du chantier qui va avoir un impact sur ces hypothèses de départ : comment atteindre les objectifs fixés sur l’utilisation de matériaux de réemploi en fonction de leur disponibilité ? Comment bien intégrer les variations de prix de tel ou tel matériau ? La démarche suppose la recherche du meilleur équilibre possible, qui peut d’ailleurs être saluée par l’obtention du label BBCA . »
David Tilliette, directeur de projet